Vue d’ensemble
Contexte historique
Composée en 1909, alors que Prokofiev avait 18 ans et qu’il était encore étudiant au Conservatoire de Saint-Pétersbourg.
Elle reflète les premières tendances expérimentales du compositeur, qui s’éloignait des idiomes romantiques et s’orientait vers son propre langage moderniste.
Ces Études ont été composées non seulement comme des exercices techniques, mais aussi comme des pièces de concert expressives, témoignant de l’audace juvénile de Prokofiev, de son dynamisme rythmique et de son audace harmonique.
On y retrouve l’influence de Scriabine, de Rachmaninov et du romantisme tardif russe, tout en s’orientant déjà vers le style percussif et motorique unique de Prokofiev.
Caractéristiques générales
Les quatre études sont très virtuoses et présentent des défis techniques spécifiques pour le pianiste.
Chaque étude explore différentes textures, complexités rythmiques et tensions harmoniques, servant à la fois d’exercices techniques et de miniatures chargées d’émotion.
Elles révèlent la bitonalité, les harmonies dissonantes, les modulations inattendues et l’écriture percussive au clavier, qui deviendront la signature de Prokofiev.
L’ensemble est plus que mécanique ; il est rempli d’expression, d’énergie, de sarcasme et de contrastes dramatiques.
Les quatre études
Allegro (do mineur)
Une étude orageuse et agressive, remplie de passages à l’octave, de gammes rapides et d’accords puissants.
Cette pièce exige une précision rythmique inflexible, un contrôle dynamique et une articulation solide.
Prokofiev y fait preuve d’une force motrice et d’une utilisation percussive du clavier qui rappellent la Toccata qu’il composera plus tard.
Moderato (ré mineur)
Lyrique et sombrement introspectif, explorant les voix intérieures, les textures complexes et les harmonies chromatiques.
Contrastant avec la première étude, il exige un phrasé expressif, un contrôle de la pédale et une conscience des couleurs tonales.
La mélodie émerge d’un champ harmonique dense, exigeant un ton chantant au milieu de la complexité.
Andante (sol dièse mineur)
Hautement chromatique et cherchant, évoquant une atmosphère mystique et scriabinesque.
L’étude se concentre sur l’harmonisation et l’équilibre, le pianiste devant révéler de subtiles lignes mélodiques au sein de textures stratifiées.
Elle exige une maîtrise des nuances dynamiques et de l’ambiguïté harmonique, avec des rythmes flottants et un équilibre délicat entre tension et résolution.
Allegro con brio (si bémol mineur)
Le plus virtuose et le plus explosif de la série.
Il comporte des passages furieux de type toccata, des sauts violents et des affrontements bitonaux.
Exige une endurance à toute épreuve, un rythme implacable et un flair dramatique.
Préfigure le style sarcastique et les gestes faussement héroïques de Prokofiev, que l’on retrouvera plus tard dans des œuvres comme les Sarcasmes et la Toccata.
Importance
Cet ensemble est une vitrine importante de l’identité naissante de Prokofiev, alliant le génie technique à l’innovation dramatique.
Bien qu’elles soient rarement jouées dans leur intégralité aujourd’hui, les études individuelles, en particulier la 4e, sont parfois incluses dans les récitals pour leur virtuosité éblouissante et leur audace stylistique.
Les Études, opus 2 marquent une étape importante dans la littérature russe pour piano, faisant le lien entre la fin du romantisme et le début du modernisme, reflétant à la fois l’univers harmonique de Scriabine et l’esthétique proto-constructiviste de Prokofiev.
Caractéristiques de la musique
Traits stylistiques généraux
Style de transition : Ces études sont écrites à la charnière du romantisme et du modernisme. Bien qu’elles fassent encore écho au langage harmonique du romantisme tardif (Scriabine, Rachmaninov), elles présentent déjà les caractéristiques du style moderniste de Prokofiev, telles que les dissonances aiguës, la bitonalité et les rythmes mécaniques.
Harmonie expérimentale : Prokofiev utilise un chromatisme dur, une ambiguïté harmonique poussée et même la bitonalité, ce qui préfigure ses œuvres de maturité ultérieures.
Entraînement rythmique et motorisme : Dans les 1re et 4e études en particulier, Prokofiev présente ses célèbres schémas rythmiques motoriques et implacables, qui deviendront emblématiques de sa musique pour piano ultérieure.
Approche percussive du piano : Le piano est traité non seulement comme un instrument chantant, mais aussi comme une machine percussive et agressive, avec des attaques puissantes, des accords lourds et des contrastes dynamiques soudains.
Densité de la texture : Les études présentent souvent une polyphonie épaisse, des textures superposées et des voix intérieures complexes, exigeant du pianiste clarté et maîtrise.
Virtuosité extrême : Prokofiev repousse les limites de la virtuosité technique en utilisant des octaves, des sauts, des notes répétées rapidement et des croisements de mains maladroits.
Expression contre mécanique : Tout en étant techniquement exigeantes, les études requièrent également une grande capacité d’expression, du lyrisme sombre des 2e et 3e études à la bravoure sarcastique de la 4e étude.
Caractéristiques de la suite (en tant qu’ensemble)
Bien qu’intitulé « Études », l’ensemble a une structure de quasi-suite, avec des humeurs et des tempos contrastés qui donnent l’impression d’un voyage psychologique à travers la tension, le lyrisme, le mysticisme et l’ironie.
Contraste et unité : Les études ont un caractère très contrasté :
N° 1 : agressive et violente
N° 2 : lyrique mais inquiétante
N° 3 : rêveuse et chromatique
n° 4 : explosive et sarcastique.
Malgré ces contrastes, le style unifié de Prokofiev – marqué par des mélodies anguleuses, des textures percussives et des rythmes entraînants – lie les pièces entre elles.
Structure des tonalités : Le choix de tonalités mineures (do mineur, ré mineur, sol dièse mineur, si bémol mineur) contribue au climat émotionnel sombre et intense de l’ensemble, renforçant l’atmosphère turbulente et instable.
L’ensemble peut être considéré comme une première exploration par Prokofiev de différents terrains émotionnels et pianistiques, expérimentant la virtuosité, la texture, le rythme et l’ambiguïté tonale.
Résumé des traits caractéristiques
Caractéristique Description
Harmonie Chromatique, dissonante, parfois bitonale
Rythme Agressif, motorique, syncopé, irrégulier
Texture Dense, stratifiée, polyphonique, percussive
Écriture mélodique Angulaire, souvent cachée dans les textures
Traitement pianistique Très virtuose, exigeant contrôle et puissance
Sentiment et expression Va de l’introspection lyrique au sarcasme
Style général Modernisme précoce, à la croisée du style mature de Scriabine et de Prokofiev
Analyse, tutoriel, interprétation et points importants à jouer
Étude no 1 en do mineur – Allegro
Analyse
Forme : Grossièrement ternaire (ABA’) avec une courte coda.
Caractère : Agressif, motorique, orageux. Le rythme implacable et les motifs de type ostinato créent une dynamique mécanique et violente.
Harmonie : Sombre, dissonante, avec de fréquents chromatismes et heurts.
Texture : Principalement des passages en octaves, des accords lourds et des notes répétées percutantes.
Didacticiel et technique
Endurance à l’octave : Le morceau exige des octaves précises et contrôlées, souvent en fortissimo. Pratiquez lentement et en vous détendant pour éviter les tensions.
Rythme moteur : La main droite joue souvent des notes répétées ou des accords avec une pulsation inébranlable. Le mouvement du poignet doit être ferme mais économe, et le bras ne doit pas être raide.
Articulation : La clarté est essentielle. Évitez le flou dans la pédale ; pédalez avec parcimonie et uniquement pour colorer les changements harmoniques, pas pour coller les octaves.
Voix des octaves supérieures : Même dans les textures agressives, veillez à ce que la note mélodique soit proéminente et dépasse la densité.
Interprétation
Jouer avec une énergie, un dynamisme et une intensité inébranlables.
Évitez le rubato romantique ; l’esthétique de Prokofiev est ici la précision mécanique, l’agression machinale et le sarcasme.
La coda doit exploser avec un maximum de puissance, tout en restant rigoureuse sur le plan rythmique.
Étude no 2 en ré mineur – Moderato
Analyse
Forme : ABA (section centrale lyrique).
Caractère : Lyrique sombre, introspectif, avec une tension cachée sous la surface.
Harmonie : Chromatique et ambiguë, avec une palette harmonique scriabinesque.
Texture : Polyphonie complexe à voix moyennes, la mélodie étant souvent enfouie dans des textures épaisses.
Tutoriel et aspects techniques
Équilibre et harmonisation : Le pianiste doit soigneusement faire ressortir les voix intérieures et les lignes mélodiques cachées dans la texture.
Pédalage : Utiliser les techniques de demi-pédale et de pédale flottante pour éviter la boue harmonique.
Nuance dynamique : Cette étude est un exercice de subtilité des couches dynamiques, du chuchotement pianissimo au mezzo-forte brûlant.
Legato et tonalité chantante : Utilisez le poids du bras et la souplesse du poignet pour créer des phrases longues et cohérentes, même en cas d’accords complexes.
Interprétation
Jouez avec retenue, introspection et une qualité subtile et chantante.
Laissez le chromatisme créer un brouillard harmonique, mais conservez la clarté des lignes mélodiques.
Cette étude devrait ressembler à un souvenir lointain ou à une confession chuchotée, avec des sous-entendus émotionnels contrôlés.
Étude no 3 en sol dièse mineur – Andante
Analyse
Forme : Libre, quasi-fantastique, ressemblant au style mystique de Scriabine.
Caractère : Éthéré, flottant, mystérieux, avec une tonalité ambiguë et un rythme insaisissable.
Harmonie : Hautement chromatique, créant des atmosphères colorées plutôt que des progressions harmoniques fonctionnelles.
Texture : Fine mais complexe, avec des arpèges délicats, des voix intérieures flottantes et des changements harmoniques subtils.
Tutoriel et aspects techniques
Contrôle du toucher pianissimo : Il s’agit d’une étude sur l’extrême douceur et la délicatesse. Pratiquez à des niveaux de chuchotement, en vous assurant que chaque note est toujours exprimée.
Pédalage : Nécessite une pédale transparente, éventuellement une demi-pédale ou une pédale de flottement, afin de préserver la couleur harmonique sans l’étaler.
Équilibre des couches : La mélodie et les lignes intérieures doivent être légèrement équilibrées par rapport aux arpèges fluides ou aux accords brisés.
Flexibilité rythmique : Un rubato subtil et des fluctuations de tempo sont nécessaires pour renforcer l’effet onirique.
Interprétation
Jouez avec mystère et calme, comme si vous peigniez le son avec des coups de pinceau de couleur et d’ombre.
L’étude doit avoir un caractère flottant, suspendu, sans lourdeur.
Évitez la régularité mécanique ; respirez dans les phrases de manière organique.
Étude no 4 en si bémol mineur – Allegro con brio
Analyse
Forme : Toccata, avec une structure A-B-A et une coda explosive.
Caractère : Sarcastique, brutal, implacable, presque faussement héroïque.
Harmonie : Dissonance agressive, avec des éléments bitonaux et des chocs harmoniques soudains.
Texture : Virtuose, avec des octaves bondissantes, des accords répétés violents et des sauts de registre extrêmes.
Tutoriel et aspects techniques
Sauts de mains extrêmes : Pratiquer avec précision et un tempo mesuré pour développer la mémoire musculaire.
Puissance et contrôle : Veillez à ce que les accords fortissimo restent contrôlés et non pas durs ou frappés.
Articulation percutante : Utilisez des attaques vives et décisives, en gardant le poignet souple mais contrôlé.
Obsession rythmique : Le morceau exige une précision rythmique inflexible, en particulier dans les motifs syncopés ou irréguliers.
Gestion de l’énergie : Évitez de vous épuiser trop tôt. Conservez votre énergie et construisez stratégiquement les points culminants.
Interprétation
Jouez avec un humour sauvage et un sarcasme mordant.
L’étude doit sonner comme une machine et être exagérée, presque comme si elle se moquait de la tradition de bravoure romantique.
La coda finale doit éclater avec une force impitoyable et brutale, mais toujours avec une grande précision rythmique.
Principaux défis techniques et musicaux de l’ensemble de la série
Objectif technique Objectif musical
Endurance dans les octaves et les accords Transmettre le sarcasme, l’agression ou l’introspection
Précision et contrôle du rythme Maintien de la clarté de la ligne intérieure et du phrasé
Expression d’ambiances contrastées (mécanique, lyrique, mystique, explosive)
Gestion de la pédale Façonner l’ambiguïté harmonique par rapport à la précision
Coordination des doigts, des poignets et des bras Projection de l’ironie et du détachement moderniste de Prokofiev
Philosophie d’interprétation finale
Éviter le sentimentalisme romantique.
Souligner l’ironie, le sarcasme et le modernisme mécanique de Prokofiev.
Utilisez des attaques percutantes et sèches dans les études agressives (1 et 4) et un contrôle subtil et coloré dans les études lyriques (2 et 3).
Privilégiez toujours le rythme, la clarté et la projection par rapport à l’excès de pédale ou au flou.
Considérez cette série comme un voyage psychologique et pianistique, de l’agression au lyrisme, au mysticisme et enfin au sarcasme explosif.
Histoire
Au début du XXe siècle, Sergey Prokofiev est encore un jeune étudiant du Conservatoire de Saint-Pétersbourg. En 1909, à l’âge de 18 ans, il commence déjà à remettre en question les conventions du romantisme russe, désireux de faire entendre sa propre voix musicale. Cette période d’ambition et d’expérimentation juvéniles a donné naissance à ses 4 Études, opus 2. Bien qu’elles soient officiellement qualifiées d’études – un genre traditionnellement associé à des exercices techniques -, Prokofiev leur a insufflé bien plus qu’un objectif pédagogique. Ces œuvres sont devenues les premiers laboratoires de son langage musical en pleine évolution, mêlant une virtuosité féroce à un esprit audacieux et moderniste.
Les Études, opus 2 reflètent un jeune compositeur qui teste les limites expressives du piano tout en explorant les extrêmes de la technique, de la dynamique et de la sonorité. À cette époque, Prokofiev est influencé par des figures telles que Scriabine et Rachmaninov, dont les œuvres imprègnent l’environnement du conservatoire. Pourtant, même dans l’ombre de ces compositeurs russes dominants, la personnalité de Prokofiev commence à s’affirmer : attaques percussives, rythmes motoriques et harmonies mordantes préfigurent le style agressif et sarcastique qui deviendra sa signature.
Malgré son jeune âge, les ambitions de Prokofiev sont évidentes. Ces études n’étaient pas destinées uniquement à la salle de répétition, mais aussi à la scène de concert. Il cherchait à provoquer autant qu’à impressionner, présentant une vision du piano non seulement comme un outil expressif, mais aussi comme une machine d’énergie moderne, capable de brutalité autant que de beauté. Ses contemporains l’ont également remarqué – l’opus 2 de Prokofiev était considéré comme audacieux, parfois choquant, mais indéniablement original.
Rétrospectivement, les 4 Études se situent au carrefour des premiers développements stylistiques de Prokofiev. Elles sont imprégnées du langage harmonique du romantisme tardif, mais elles pulsent la recherche inquiète d’une nouvelle identité musicale qui s’épanouira pleinement dans ses œuvres ultérieures comme la Toccata, les Sarcasmes et les Visions fugitives. Le recueil est également important car il marque l’une des premières fois où Prokofiev applique en musique sa fascination de toujours pour le contraste, l’ironie et le grotesque, en équilibrant l’introspection lyrique et le sarcasme violent.
Bien que les Études, opus 2 ne soient pas aussi souvent jouées aujourd’hui que ses œuvres pour piano plus mûres, elles demeurent un document essentiel des premières luttes et ambitions artistiques de Prokofiev. Elles révèlent un compositeur encore en train d’absorber les traditions qui l’entourent, mais déjà impatient de les démolir et de les reconstruire à sa propre image, tranchante et moderniste.
Une pièce ou un livre de collection populaire à l’époque…
En réalité, les 4 Études, opus 2 de Prokofiev n’ont pas connu une grande popularité ni un grand succès commercial lorsqu’elles ont été composées et publiées pour la première fois en 1909.
À l’époque, Prokofiev était encore étudiant au Conservatoire de Saint-Pétersbourg, et sa réputation de compositeur et de pianiste commençait à peine à prendre forme au sein d’un cercle académique et d’avant-garde relativement restreint. Les 4 Études, opus 2 ont été considérées comme expérimentales, audacieuses et techniquement exigeantes, mais elles n’ont pas bénéficié d’une large acceptation du public ni d’une popularité de masse. Au début du XXe siècle, le public et les éditeurs préféraient encore les œuvres de compositeurs établis comme Rachmaninov, Scriabine et Medtner, dont la musique pour piano – bien que moderne et virtuose – était encore ancrée dans une esthétique plus romantique et mélodique.
Les premières œuvres de Prokofiev, notamment les Études, opus 2, étaient souvent considérées par le public et les critiques russes les plus conservateurs comme dures, mécaniques ou provocantes et dissonantes. Même dans les cercles progressistes de Saint-Pétersbourg et de Moscou, elles étaient considérées comme audacieuses et inhabituelles plutôt que comme des œuvres de concert populaires ou appréciées. Il est également peu probable que les partitions se soient vendues en grand nombre à l’époque de leur parution. L’éditeur de Prokofiev (à l’origine la firme Jurgenson) a bien publié les pièces, mais elles n’ont pas connu une grande diffusion ni un grand succès par rapport aux œuvres pour piano de contemporains plus grand public.
En outre, les défis techniques des études ne les rendaient accessibles qu’aux pianistes les plus accomplis, ce qui réduisait encore leur public. Elles étaient davantage considérées comme des curiosités intellectuelles et techniques – des œuvres admirées par les professionnels, les critiques et les musiciens aventureux, mais pas par le grand public pianiste ou les pianistes amateurs.
Ce n’est que plus tard, dans les années 1910 et 1920, alors que la renommée de Prokofiev s’étendait à l’échelle internationale, que certains pianistes ont revisité ces œuvres de jeunesse comme précurseurs de ses pièces plus célèbres, telles que la Toccata, opus 11, les Sarcasmes, opus 17, et les Visions fugitives, opus 22. Rétrospectivement, elles ont été appréciées comme une étape importante dans son développement, mais elles n’ont jamais été des « best-sellers » ou largement jouées à leur époque.
Résumé Réponse
Non, les 4 Études, opus 2 n’ont pas connu de succès populaire ou commercial à l’époque de leur parution.
Elles étaient considérées comme expérimentales, audacieuses et sévères, plus admirées par les musiciens d’avant-garde et les étudiants que par le grand public.
Les ventes de partitions ont probablement été modestes, reflétant le statut de Prokofiev, qui n’était alors qu’émergent, mais pas encore internationalement connu.
Leur véritable importance était artistique et développementale, et non commerciale.
Épisodes et anecdotes
1. La déclaration « antiromantique » de Prokofiev
À l’époque où Prokofiev écrivit les Études, il rejetait activement le romantisme luxuriant et sentimental de l’ancienne génération de compositeurs russes. Son professeur Anatoly Lyadov n’aimait pas particulièrement ces premières œuvres, qu’il trouvait trop abrasives. Prokofiev admit plus tard qu’il avait composé ces études en partie pour rompre avec le moule Rachmaninov-Scriabine, affirmant qu’il voulait créer une musique aux sonorités dures, sèches et ironiques, ce qui, selon lui, manquait à la scène pianistique russe trop émotionnelle.
2. Une préfiguration du style de la Toccata de Prokofiev
L’Étude n° 4 en si bémol mineur est souvent considérée par les musicologues comme un précurseur de la célèbre Toccata, opus 11 (1912) de Prokofiev. On y retrouve l’énergie implacable, les textures dures de la toccata et l’humour mordant qui allaient devenir des éléments centraux du style de Prokofiev. Certains pianistes ont même qualifié l’Étude n° 4 de « proto-Toccata », bien qu’elle reste moins connue.
3. Les interprétations de Prokofiev
Prokofiev lui-même jouait souvent des extraits des Études, opus 2 lors de récitals d’étudiants à Saint-Pétersbourg, les utilisant comme un moyen de choquer le public et de démontrer son caractère rebelle au piano. Les comptes rendus contemporains décrivent comment il mettait l’accent sur le caractère percussif, presque brutal, de la musique, s’attirant à la fois l’admiration et les critiques de ses pairs.
4. Dédicace et réception privée
Contrairement à certaines de ses œuvres ultérieures, les 4 Études, opus 2 n’ont pas été officiellement dédiées à un professeur ou à un pianiste en particulier, ce qui reflète l’attitude indépendante, voire arrogante, de Prokofiev à l’époque. Les premières exécutions privées de ces pièces furent accueillies avec curiosité mais aussi avec confusion, certains professeurs du conservatoire les qualifiant de « froides “ ou de ” mécaniques », tandis que des étudiants progressistes en admiraient l’audace.
5. Influence de Scriabine et de Rachmaninov, mais avec rébellion
Bien que Prokofiev ait voulu rompre avec les influences de Scriabine et de Rachmaninov, le langage harmonique et les textures pianistiques des Études montrent qu’il était encore dans leur ombre – en particulier dans les Études n° 2 et n° 3, qui présentent un langage mystique et chromatique très proche de la période médiane de Scriabine. L’ironie est que Prokofiev a critiqué ces mêmes éléments dans les œuvres de ses pairs, alors qu’ils apparaissent (sous une forme plus dure et plus dissonante) dans sa propre musique.
6. Rarement interprétées dans leur intégralité
Historiquement, les 4 Études, opus 2 ont rarement été interprétées dans leur intégralité, même par Prokofiev lui-même. Les pianistes avaient tendance à choisir l’Étude no 1 ou no 4 pour leur caractère fougueux et virtuose, laissant les Études no 2 et no 3, plus introspectives, relativement négligées.
7. La redécouverte au XXe siècle
Ce n’est qu’au milieu du XXe siècle, avec des pianistes comme Sviatoslav Richter et Vladimir Ashkenazy, que certaines parties des Études opus 2 ont été remises à l’honneur lors de récitals et d’enregistrements, souvent dans le cadre de programmes consacrés aux « œuvres de jeunesse » de Prokofiev. Cependant, même aujourd’hui, elles restent une pièce de niche dans le répertoire du pianiste, admirées pour leur importance historique plus que pour leur popularité auprès du public.
Compositions / Suites / Collections similaires
Certainement. Voici des recueils, des suites ou des compositions comparables aux 4 Études, opus 2 de Prokofiev en termes d’esprit, de style et d’intention artistique, en particulier en ce qui concerne la littérature pour piano du début du XXe siècle qui allie virtuosité, expérimentation, audace moderniste et ironie :
Compositions et collections similaires
1. Alexandre Scriabine – Études, Op. 42 (1903)
Ces études montrent Scriabine au sommet de son langage mystique, chromatique et pianistique.
Comme l’opus 2 de Prokofiev, elles repoussent les limites techniques et harmoniques du piano, avec des textures complexes et des émotions intenses.
Les deux recueils montrent une transition du romantisme tardif vers le modernisme précoce, bien que l’approche de Scriabine soit plus ésotérique, tandis que celle de Prokofiev est plus mécanique et sarcastique.
2. Igor Stravinsky – Quatre études, opus 7 (1908)
Composées à peu près en même temps que l’opus 2 de Prokofiev.
Les études de Stravinsky expérimentent les dissonances mordantes, les registres extrêmes et l’angularité rythmique, qui inspireront plus tard ses grands ballets.
Les deux compositeurs montrent une fascination pour la dureté et les rythmes moteurs.
3. Sergei Rachmaninoff – Études-Tableaux, Op. 33 (1911)
Tout en restant luxuriantes et romantiques, ces études sont expérimentales sur le plan de la structure, de l’harmonie et des textures pianistiques.
Comme les études de Prokofiev, elles sont plus que des études techniques – ce sont des miniatures dramatiques, mêlant virtuosité et intensité narrative.
L’approche de Rachmaninov est plus lyrique et plus sombre, mais l’exploration des couleurs pianistiques présente des similitudes.
4. Claude Debussy – Études (1915)
Bien que plus tardives, les études de Debussy réinventent le genre en utilisant des approches sarcastiques, ironiques et très texturées, qualités que Prokofiev a explorées dans l’opus 2.
Les deux compositeurs transforment l’étude d’un exercice didactique en une déclaration artistique audacieuse.
5. Béla Bartók – Trois études, op. 18 (1918)
Ces études sont extrêmement percutantes, dissonantes et rythmiquement agressives, dans le même esprit que les Études, opus 2, de Prokofiev.
Les deux compositeurs utilisent des techniques barbares et motoriques et des sonorités en grappe, poussant le son du piano à ses limites physiques.
6. Nikolaï Medtner – Mélodies oubliées, opus 38 (1920)
Bien que stylistiquement plus conservatrices que celles de Prokofiev, les œuvres de Medtner de cette période sont profondément personnelles et techniquement exigeantes.
Il partage un intérêt pour les textures complexes et les ambiguïtés harmoniques modernes, bien que Medtner évite l’ironie de Prokofiev.
7. Sergey Prokofiev – Toccata, op. 11 (1912) & Sarcasmes, op. 17 (1912-1914)
Ces œuvres sont les successeurs naturels des 4 Études, opus 2.
Elles développent la brutalité de la toccata, le sarcasme et les rythmes moteurs de Prokofiev à un niveau plus mature et pleinement réalisé.
Sarcasmes partage en particulier le grotesque ironique et les gestes violents évoqués pour la première fois dans l’Op. 2.
8. Leo Ornstein – Suicide en avion (1918)
Les œuvres pour piano futuristes et agressives d’Ornstein, comme Suicide in an Airplane, partagent le langage mécanique et percussif de Prokofiev.
Les deux compositeurs ont été parmi les premiers à traiter le piano comme une machine agressive et percussive, et non comme un simple instrument mélodique.
En résumé :
Les 4 Études, opus 2 de Prokofiev appartiennent à une génération transitoire d’études et de recueils pour piano du début du XXe siècle, où le genre est devenu une plateforme d’expérimentation radicale.
Les éléments communs à ces œuvres sont les suivants :
un langage moderniste (dissonance, bitonalité, ambiguïté modale)
Exigences virtuoses dépassant le cadre du pianisme romantique
sarcasme, ironie, grotesque et percussion
le rejet ou la déformation du lyrisme romantique
(Cet article est généré par ChatGPT. Et ce n’est qu’un document de référence pour découvrir des musiques que vous ne connaissez pas encore.)
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